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Quel est le rapport de force militaire entre la Russie et l’Europe?
Saturday, 6 December, 2025
Alors que l’Europe pointe les risques d’un affrontement avec Moscou d’ici la fin de la décennie, une étude de l’Institut français des relations internationales analyse les capacités militaires de l’Ouest et de l’Est. Décryptage. Comme à l’époque de la guerre froide, l’Ifri s’interroge en Europe et en Russie combien de divisions ? Et surtout qui a l’avantage ? Dans les airs et sur les mers, pas de doute possible, pointe Elie Tenenbaum, auteur de la note, l’Europe surclasse Moscou. « On a regardé dans notre rapport les capacités d'entraînement, de pouvoir mener des opérations complexes à large échelle. Et de ce point de vue-là, clairement, les Européens ont aujourd'hui un avantage dans le domaine aérien et dans le domaine maritime, qui est sans conteste face à la Russie. Encore faut-il être en mesure d'exploiter ces avantages avec suffisamment de munitions avec le personnel qui convient. Aujourd'hui, c'est le cas, mais il y a une tension sur les pilotes et surtout en adoptant une stratégie qui vise à mettre en avant ces forces. Par exemple, la supériorité maritime aujourd'hui des Européens, elle n'est pas fondamentalement exploitée. Quand on voit la Russie qui, en exploitant sa flotte fantôme de navires qui exportent le pétrole, finalement passe au nez et à la barbe des marines de guerre européennes qui, au nom du droit international, les laissent passer… Donc on n'est pas forcément aujourd'hui dans des stratégies générales qui mettent en avant l'exploitation de ces avantages ». Des trous capacitaires côté européen Si les armées européennes bénéficient d’une supériorité technologique, elles pâtissent en revanche de trous capacitaires et d’une puissance de feu limitée, insiste le directeur de recherche de l’Ifri. « Il y a une certaine faiblesse dans le domaine de la puissance de feu, tous domaines confondus, sur le plan terrestre des frappes longue portée, sur la dimension aérienne et la quantité de munitions. On parle de missiles air-air ou de munitions air-sol qui pourraient exploiter une éventuelle supériorité aérienne. Et même dans le domaine naval, avec un nombre de cellules de lancement par navire de surface par exemple, qui est inférieur à ce qu'on peut trouver ailleurs dans le monde. Donc, on pourrait avoir un renforcement du côté de la puissance de feu ». « L'autre grand axe, c'est tout ce qu'on appelle les "enablers" en anglais (facilitateurs), c'est-à-dire des capacités habilitantes qui donnent une forme de cohérence à l'ensemble, poursuit Elie Tenenbaum. Les Européens ont à peu près tout ce qu'il faut du côté des capacités de combat en ligne, sur le front, nombre d'avions de combat, nombre de véhicules. En revanche, certaines capacités de commandement et de contrôle, de renseignement dans la profondeur, qui donnent finalement la cohérence et la puissance à ces armées modernes qui dépendent très largement de la boucle entre les capteurs et les effecteurs, jusqu'à présent, ont toujours été assurées par les Américains. Alors, il y a un certain nombre de scénarios dans lesquels les Américains continueraient à fournir cette boucle. En revanche, si on part, comme on a essayé de le faire un petit peu sur des hypothèses plutôt moins disantes côté américain, là on voit bien que ça pèche du côté européen ». À lire aussiL'Europe peut-elle devenir un géant de l'industrie de défense? La Russie possède un point fort : la masse de son armée Vladimir Poutine porte l’ambition d’un modèle d’armée fort d’un million cinq cent mille hommes, soit deux fois plus de soldats qu’en Europe. « Il y a une masse légèrement favorable à la Russie, même si les périmètres sont difficiles à calculer en fonction des réserves des uns et des autres. Ça va s'accroître si Vladimir Poutine arrive à mettre en œuvre son modèle de force à 1 500 000 hommes. Mais c'est notamment frappant dans le domaine des forces terrestres où effectivement la Russie a un léger avantage sur le papier. Mais cet avantage tend un petit peu à se renforcer quand vous regardez la capacité à puiser dans cette ressource en effectifs. Parce que finalement, la Russie étant un pays unifié, elle peut mobiliser une grande partie de sa force de combat, là où les Européens étant évidemment répartis en une petite trentaine de pays, si on considère les pays européens membres de l'Otan et parmi eux, on sait bien qu'un certain nombre n'engageraient pas forcément leurs forces. Vous avez un effet un petit peu armée mexicaine, et donc à la fin, c'est sans doute moins de 700 000 combattants des forces terrestres en Europe qui pourraient être mobilisés. » Cohésion et volonté, piliers de la dissuasion militaire Pour être dissuasive, souligne Elie Tenenbaum, l’Europe devra faire preuve d’une unité sans faille, la moindre défection dans ses rangs fragiliserait son architecture de défense. « L'Europe, collectivement, a les moyens économiques, le savoir-faire militaire et les compétences industrielles et technologiques pour faire face à la Russie. À la condition d'en avoir la volonté et de faire preuve de la cohésion nécessaire. Et donc la cohésion avec la volonté sont aujourd'hui peut-être les deux facteurs déterminants. Si tous les Européens se serrent les coudes, y compris avec l'Ukraine, la Russie est dissuadée à ce stade parce que collectivement, ils représentent une masse suffisamment imposante pour décourager. En revanche, si on a une division, vous vous retrouvez avec un système qui est moins cohérent sur le plan de la mobilité militaire. Il suffit d'imaginer un pays rotule comme l'Allemagne, qui décide de ne plus laisser passer les convois d'approvisionnement qui basculent de l'ouest à l'est de l'Europe. On voit bien que les choses deviendraient très vite très compliquées. Donc cette cohésion, elle est, et on le sait depuis longtemps, le centre de gravité de l'Alliance atlantique et de la défense de l'Europe ». Seul point d’équilibre : les crédits militaires. L’Europe consacrant à sa défense 400 milliards d’euros par an, et Moscou 150 milliards d’euros. Mais à parité de pouvoir d’achat, les budgets russes et européens sont presque équivalents. À lire aussiL’Union européenne présente sa feuille de route pour une défense indépendante d’ici à 2030












