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Syrie: un an après la chute de Bachar el-Assad, à Moadamiyeh, les expropriations divisent toujours
Sunday, 7 December, 2025
En Syrie, un an après la chute de la dictature de Bachar el-Assad, près de trois millions de familles déplacées par la guerre ont fait le choix de rentrer dans leur ville d'origine. À leur retour, nombre d'entre elles font face à des logements occupés et à des terres expropriées, le plus souvent par des familles alaouites, minorité accusée d'être liée au clan Assad. À Moadamiyeh, dans la Ghouta occidentale, ces expropriations participent à la montée des tensions communautaires. De notre envoyée spéciale à Damas, De l'autre côté d'un barbelé, deux hommes regardent les étendues de terres qui appartenaient autrefois à leurs grands-parents. Des terres expropriées il y a 40 ans par l'ancien régime Assad, avant d'accueillir la macabre prison de l'aéroport militaire de Mezzeh. « Ma plus grande blessure, c'est que mon frère et mon fils, qui étaient propriétaires de ces terres, y ont été emmenés, torturés, écrasés, puis tués. Tués sur leurs propres terres ! », raconte le premier. « Voler la terre d'un être humain, c'est comme voler son âme », renchérit le second. À (re)lire aussiBachar el-Assad amende une loi qui menaçait d'exproprier des millions de Syriens 83% des habitants expropriés de leurs terres À Moadamiyeh, ville historiquement révolutionnaire de Syrie, les expropriations auraient concerné, selon ses habitants, 83% des terres. À l'époque, elles visaient à loger des familles d'officiers du régime et à construire des infrastructures militaires. « Le régime a fait ça partout, tout autour de Damas. Pour que, si jamais une révolution éclate – comme ce fut le cas –, ils puissent nous assiéger », poursuit l'un de nos interlocuteurs. Au total, ces deux hommes affirment avoir été privés de 22 000 m², pour une valeur estimée, disent-ils, à près de 15 millions de dollars, soit plus de 12 millions d'euros. Une partie de ces terres est aujourd'hui recouverte par les maisons de tôle du quartier alaouite de Somoriyeh : « Le quartier commence au niveau de cette gare jusqu'à la route qui mène à Beyrouth, là-bas. Ce sont tous des partisans de l'ancien régime. À l'époque, ils arrêtaient les habitants de Moadamiyeh et de Daraya pour les ramener ici, les torturer, voire les tuer. » Tout autour du quartier, une clôture a été érigée il y a une dizaine de jours par les autorités. Officiellement, elle vise à séparer les familles alaouites des logements destinés aux nouveaux officiers. Une version à laquelle les habitants ne croient pas. « C'est une manière de nous compliquer la vie, pour qu'on quitte nos maisons par nous-mêmes », avance un habitant alaouite. À écouter aussiSyrie : après la chute de Bachar el-Assad, la difficile unification du pays « À l'époque du régime, personne ne nous réclamait ces terres ! » La plupart redoutent d'être délogés, voire de subir des représailles. « Cet été, des hommes sont venus en nous disant que ces terres appartenaient aux familles de Moadamiyeh. Ils criaient et essayaient de nous dégager. Ils avaient des armes et ils sont entrés dans nos maisons », raconte un second habitant. Ahmad – prénom d'emprunt –, âgé de 25 ans, affirme avoir été interpellé par la Sécurité générale : « Ils m'ont frappé avec des bâtons dans le dos et à la tête. » Sa mère, assise à ses côtés, se balance nerveusement sur sa chaise : « J'ai peur qu'ils me sortent de chez moi. Je n'ai pas d'autre maison. » À ses côtés, un vieil homme sort alors un document, se disant propriétaire de son logement depuis 40 ans. En réalité, sur la feuille, une décision non officielle d'un comité lié à l'ancien régime. « Je les ai achetées à un homme dans la rue qui disait vendre des terrains. Je ne comprends pas : à l'époque du régime, personne ne nous réclamait ces terres ! », assure-t-il. Pour tenter d'apaiser les tensions, le gouverneur de Damas a assuré que personne ne serait expulsé tant qu'une solution de relogement n'aura pas été trouvée. À lire aussiSyrie: dans la ville frontalière d'Al-Hamidiyeh, des maisons détruites par les bulldozers israéliens






